autorité, mais comme étant d’un livre soutenu et autorisé par un corps
très-considérable. Nous avons douleur de le dire, car, quoique nous
n’ayons jamais ignoré les premiers auteurs de ces désordres, nous n’avons
pas voulu les découvrir néanmoins ; et nous ne le ferions pas encore,
s’ils ne se découvroient eux-mêmes, et s’ils n’avoient affecté de se faire
connoitre à tout le monde. Mais, puisqu’ils veulent qu’on le sache, il nous
seroit inutile de le cacher, puisque c’est chez eux-mêmes qu’ils ont fait
débiter ce libelle ; que c’est dans le collège de Clermont que s’est fait ce
trafic scandaleux ; que ceux qui y ont porté leur argent, en ont rapporté
autant qu’ils ont voulu d’Apologies pour les casuistes ; que ces
pères les ont portées chez leurs amis à Paris et dans les provinces ; que
le P. Brisacier, recteur de leur maison de Rouen, les a distribuées ;
qu’il a fait lire cet ouvrage en plein réfectoire, comme une pièce
d’éducation et de piété ; qu’il a demandé permission de le réimprimer à l’un
des principaux magistrats ; que les jésuites de Paris ont sollicité deux
docteurs de Sorbonne pour en avoir l'approbation ; qu’ils en ont demandé
le privilège à M. le chancelier ; puisque enfin ils ont levé le masque, et
qu’ils ont voulu se faire connoître en tant de manières, il est temps que
nous agissions, et que, puisque les jésuites se déclarent publiquement
les protecteurs de l’Apologie des casuistes, les curés s’en déclarent publiquement
les dénonciateurs. Il faut que tout le monde sache que,
comme c’est dans le collège de Clermont qu’on débite ces maximes pernicieuses,
c’est aussi dans nos paroisses qu’on enseigne les maximes
chrétiennes qui y sont opposées, afin qu’il n‘arrive pas que les personnes
simples, entendant publier si hautement ces erreurs par une compagnie
si nombreuse, et ne voyant personne s’y opposer, les prennent pour des
vérités, et s’y laissent insensiblement surprendre ; et que le jugement de
Dieu s’exerce sur les peuples et sur leurs pasteurs, selon la doctrine des
prophètes, qui déclarent, contre ces nouvelles opinions, que les uns et
les autres périront : les uns, faute d’avoir reçu les instructions nécessaires ;
et les autres, faute de les avoir données.
Nous sommes donc dans une obligation indispensable de parler en cette rencontre ; mais ce qui l’augmente encore beaucoup, est la manière injurieuse dont les auteurs de cette Apologie y déchirent notre ministère ; car ce livre n’est proprement qu’un libelle diffamatoire contre les curés de Paris et des provinces, qui se sont opposés à leurs désordres. C’est une chose étrange de voir comment ils y parlent des extraits que nous présentâmes au clergé de leurs plus dangereuses propositions, et qu’ils ont la hardiesse de nous traiter pour ce sujet (p 5 et 311) « d’ignorans, de factieux, d’hérétiques, de loups et de faux pasteurs ! » « Il est bien sensible à la compagnie des jésuites, disent-ils (p. 31), de voir que les accusations se forment contre elle par des ignorans qui ne méritent pas d’être mis au nombre des chiens qui gardent le troupeau de l’Eglise, qui sont pris de plusieurs pour les vrais pasteurs, et sont suivis par les brebis qui se laissent conduire par ces loups. »
Voilà le comble de l’insolence où les jésuites ont élevé les casuistes ; après avoir abusé de la modération des ministres de l’Église pour in-