Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/401

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tissement de la pointe de bourgeon de la vie intérieure.



Que Hugo lui-même, l’auteur, ait senti lui-même que ce qui se passait dans sa tête ce jour-là était quelque chose de pas ordinaire, c’est ce qui ne fait aucun doute quand on sait seulement regarder un texte. Cette courbe, cette aisance d’orgueil païen. Cette plénitude aisée. Ce gonflement de sa puissance. Ce ton comme avantageux. Et presque provoquant. Cette courbe d’orgueil. Cet avantage pris, enlevé. Cette sorte de ton tout particulier. Ce mouvement de fleuve aisé, de Loire et de Rhin victorieux. Comme il n’avait aucun sentiment chrétien, lui la contre partie il n’avait point de contre partie. Aussi l’orgueil païen, l’orgueil d’une domination victorieuse coulait-il ce jour là dans un lit de plénitude, dans un lit d’aisance, dans un lit de facilité. Qu’il ait senti ce jour là qu’il balançait tout un monde, lui Hugo, (il n’était pas si bête, quand il s’agissait de sa carrière, de ses réussites, de son talent, de sa gloire, et surtout quand il y allait de son génie), que ce jour là était pour lui un jour d’élection certainement unique, qu’il s’était produit ce jour là, ce jour unique, pour lui Hugo, à l’avantage de lui Hugo, (on ne sait pas pourquoi, mais c’est toujours ainsi), on ne sait quelle contamination entre le royaume du génie et le royaume de la grâce, on ne sait quel écoulement, quel épanchement (charnel spirituel), quelle dérivation, quel déversement du royaume de la grâce dans le royaume