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Page:Pelland - Biographie, discours, conferences, etc. de l'Hon. Honoré Mercier, 1890.djvu/809

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Denis, à St-Charles ou à St-Eustache, et même hélas ! sur les échafauds, pour vous conserver le droit de parler cette belle langue et d’en transmettre le noble idiome à vos enfants.

Vous seriez d’autant moins justifiables d’en négliger la culture qu’elle est la langue du monde diplomatique ; que la plupart des hommes instruits la parlent bien et que la ville de New-York la fait enseigner dans toutes les écoles du jour et dans plusieurs de ses écoles du soir. — Au Vatican, au Quirinal, à Londres, à Madrid, à Berlin, à St-Petersbourg et à Constantinople, notre langue est en honneur. Parlons-la donc avec plaisir et fierté, nous Canadiens-français, partout où nous sommes.

Mais n’oubliez pas que, si vous devez conserver la langue française, vous devez apprendre et parler la langue anglaise, qui est celle de la majorité de ce pays ; qu’il vous faut la connaître, théoriquement d’abord, et pratiquement ensuite, et savoir vous en servir avec succès dans les affaires, dans les assemblées publiques, et dans toutes les occasions où il s’agit de vous affirmer, de vous défendre et de vous protéger. Plusieurs des nôtres ont déjà, dans quelques Etats de l’Union, brigué avec succès les suffrages des électeurs ; et ils ont réussi parce qu’ils possédaient nul doute, les qualifications voulues ; mais certainement aussi parce que l’une de ces qualifications, et non la moins importante, était la connaissance de la langue anglaise. Dans les législatures des Etats-Unis et au Congrès, l’anglais est la seule langue officielle, et les Canadiens ne peuvent espérer y jouer un rôle convenable qu’en autant qu’ils sont en état de bien comprendre cette langue et de la parler d’une manière satisfaisante.

J’insiste d’autant plus sur ce point que je le crois de premier ordre et de nécessité vitale pour les Canadiens-français des Etats-Unis.

Je ne suis pas sans savoir que mon opinion est condamnée par quelques personnes, fort respectables et jouissant d’une influence légitime, parmi mes compatriotes.

Je sais que ces personnes, animées d’un excellent esprit, et mues par un chaud patriotisme, craignent que l’enseignement de l’anglais dans les écoles canadiennes ne fasse perdre aux enfants le goût du français et les expose à s’américaniser.