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XXXIV

LE CHÂTELET

Dans cette terrible semaine, rien ne fut comparable à la cour martiale du Châtelet. Seule, elle suffirait pour rendre à tout jamais exécrable le souvenir de la répression.

L’histoire s’étonnera que de telles horreurs aient pu s’étaler à la lumière, en plein dix-neuvième siècle, au cœur de Paris, se continuer plusieurs jours avec une sorte de régularité officielle, et réunir sur une place publique des milliers de spectateurs, sans que le gouvernement arrêtât la tuerie qui se faisait en son nom, sans qu’un mot, un seul petit mot fût prononcé à la tribune française, sans même qu’on parût, dans les années qui suivirent, en avoir conservé la mémoire.

Pour la cour martiale du Châtelet, les documents abondent ; le Siècle et le Gaulois du 29 mai, la Patrie et le Figaro du 30, les Débats du 31, notamment, décrivent le féroce tribunal. M. l’abbé Vidieu, vicaire à Saint-Roch, qui a publié en 1876 une Histoire de la Commune de Paris, y donne, à titre de témoin oculaire, les détails les plus précis sur cet affreux abattoir. Enfin, le procès de la Lanterne, en faisant connaître les circonstances de la mort de Villain, a rappelé la cour du Châtelet à tous les souvenirs. J’ai eu de plus des documents et des renseignements inédits qui me permettent de compléter le triste tableau des massacres du Châtelet.

Il ne s’agit plus ici d’exécutions isolées comme au Luxembourg ; c’est par fournées que les victimes sont envoyées à l’abattoir.