Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/231

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de quelles menaces, de quels cris de mort ! le lecteur le devine. La Patrie du 30 mai parle en termes curieux de cet accueil fait aux prisonniers : « Leur mise et leur démarche excitent le mépris et l’indignation de la foule prête à se ruer sur eux. C’est à grand’peine que les soldats de l’escorte peuvent contenir quelques-uns des assistants qui veulent se précipiter sur ces misérables. » Que dites vous de cette indignation excitée par des mises et des démarches ?

Les prisonniers, une fois entrés dans le théâtre, n’étaient pas soustraits pour cela aux cris furieux de la multitude. Ils attendaient leur tour sur la terrasse couverte du premier étage. On les voyait d’en bas reparaître au balcon du promenoir. Si, alors, ils étaient soustraits aux voies de fait, les clameurs les poursuivaient jusque-là, comme pour les désigner aux rigueurs de la cour martiale. La meute, restée à la porte, aboyait encore après le gibier placé hors de sa portée.

L’abbé Vidieu décrit ainsi la scène :

« Quand on les voyait se promenant sur la terrasse, ils étaient l’objet des malédictions de la foule qui stationnait sur la place du Châtelet.

» Ces cris de réprobation, il faut bien le dire, étaient loin de déconcerter les insurgés qui portaient haut la tête. Cette attitude était surtout remarquable chez les combattants, et leurs réponses provocantes ne s’harmonisaient que trop avec le cynisme de leur physionomie : « Nous avons perdu les deux premières parties, celle de juin 1848 et celle de mai 1871 ; mais nos arrière-neveux gagneront la troisième. »

Quelque confiance que nous ayons dans la parole du vicaire de Saint-Roch, nous avons quelque peine à croire que les prisonniers, à moins d’avoir des porte-voix, répondissent par un exposé de principes, du