Page:Pelletier - Mon voyage aventureux en Russie communiste, 1922.djvu/190

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
182
mon voyage aventureux

ses bateaux à soupape étaient « un système très ingénieux » et qu’il faudrait imiter !

Je conçois la terreur comme une nécessité ; mais je pense qu’il faut ne l’employer que le plus rarement possible et ne jamais y prendre plaisir. Lorsqu’on prodigue la mort, les gens s’y habituent comme à tout autre chose et elle ne remplit plus son office qui est d’épouvanter l’ennemi.

Mais je ne connais la terreur que par les livres ; mon contradicteur a été officier, il a fait la guerre et la vie humaine, qui me semble à moi la chose la plus précieuse ne compte pas pour lui.

Le sommeil ne vient pas cette nuit-là ; pourquoi ? N’ai-je pas au cours de ma vie de militante entendu des centaines de conversations semblables ; combien de gens n’ai-je pas entendu fusiller en paroles et moi-même combien de fois ne l’ai-je pas été ? À Paris, cela me faisait rire parce que je savais bien qu’il ne s’agissait que d’un jeu ; la chose viendrait-elle jamais, en tout cas elle était très loin.

Ici on ne joue pas et sous les rues noires de la ville, il y a des caves où on pleure, où on désespère où on meurt. Décidément j’ai besoin de tout un cours de révolution.

La terreur, à Moscou, est très intelligemment organisée. Point de ces charrettes pleines de condamnés qui longeaient en 1793 notre rue Saint-Honoré ; on n’exécute pas sur la place Rouge