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en russie communiste

comme notre Révolution exécutait sur la place de la Concorde. Durant tout mon séjour je n’ai jamais vu tuer personne. J’entendais seulement dire que, la nuit précédente, on avait fusillé tel ou tel. Les Russes d’aujourd’hui sont plus psychologues que ne l’ont été nos ancêtres de la fin du xviiie siècle.

Tous les révolutionnaires russes ne sont pas insensibles.

Il y a eu des bourreaux qui sont devenus fous d’épouvante ; d’autres sont tombés malades. Aussi un Allemand, mon voisin de palier, à qui j’apprends un peu de Français, répète volontiers, lorsque la donneuse de journaux chante notre Carmagnole :

Tous les bourgeois on les pendra.

— Oui, on les pendra, mais il faut des spécialistes !

J’ai demandé mon passeport depuis longtemps, mais, par malheur, Souvarine est parti à Berlin ; je n’ai plus personne pour me pistonner, alors on me fait attendre. Tous les deux ou trois jours, je vais harceler les bureaux du Komintern ; rien n’y fait.

Et je n’ai plus d’argent. Il m’en faudrait absolument cependant ; je mange très peu de ce qu’on me donne et j’ai faim. Je sais que le « Komintern » donne de l’argent aux délégués pour le retour ; si