Page:Percier, Fontaine - Recueil de décorations intérieures, 1812.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

généralement éclairé : on n’en veut par aucune raison que celle qui fait vouloir la coupe d’habit ou de coiffure du jour. On ne veut pas ces choses parce qu’on les trouve belles ; mais on les trouve belles parce qu’on les veut : aussi leur arrive-t-il promptement de subir le sort de tous les produits de la mode. L’industrie s’en empare, les reproduit de mille façons économiques, les met à la portée des moindres fortunes. Toutes les sortes de falsifications dénaturent leur valeur. Le plâtre tient lieu de marbre, le papier joue la peinture, le carton imite les travaux du ciseau, le verre se substitue aux pierres précieuses, la tôle remplace les métaux, les vernis contrefont les porphyres. De là résulte un premier abus, qui procède de l’esprit même de la mode, c’est de rendre vil ce qui devient commun, c’est de déprécier rapidement dans l’opinion, des choses que l’on trouve prostituées aux emplois les plus vulgaires ; car rien ne peut empêcher que les plus beaux ouvrages ne perdent ainsi une partie de leur beauté. Cet effet arriverait aux ouvrages mêmes de la nature ; et si parmi eux la beauté était plus commune, on ne peut s’empêcher de croire que notre âme serait moins affectée, moins touchée de son charme.

Mais l’abus le plus grave attaché à la prostitution qu’on ne cesse de faire des inventions de l’art et du goût, c’est de leur enlever par l’économie du travail, par la contrefaçon, des matières, et par des procédés méthodiques ou mécaniques, cette perfection d’exécution, ce fini précieux, cette touche d’un sentiment original, que la théorie seule sépare de la conception et de l’invention, mais qui véritablement en est inséparable.