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DEUXIEME PARTIE DU ROMAN DE LA ROSE

copistes ont supprimée, que d’autres recommandent de ne lire ni en présence des frères mendiants, trop vindicatifs, ni devant les laïques, qu’on pourrait induire en erreur, a toutes les apparences d’une addition intercalée par l’auteur dans son poème (v. 11263-12213).

Après la confession de Faux-Semblant, l’armée se divise en quatre groupes, qui vont respectivement assiéger les quatre portes du château. Faux-Semblant, en habits de jacobin, et Contrainte-Abstinence, en habits de béguine, se présentent à Male-Bouche en se donnant comme pèlerins, le sermonnent et lui persuadent qu’il a calomnié l’amant, qui ne songe nullement à Bel-Accueil. Male-Bouche convaincu s’agenouille pour confesser sa faute et Faux-Semblant l’étrangle. Les deux prétendus pèlerins entrent alors dans l’enceinte du château, suivis de Courtoisie et de Largesse. Ils y rencontrent la Vieille ; par paroles, dons et promesses, et par l’assurance que Male-Bouche est mort, ils obtiennent d’elle qu’elle portera à Bel-Accueil une couronne de fleurs nouvelles et un salut de la part de l’amant, et même qu’elle introduira celui-ci dans la tour. La Vieille va trouver Bel-Accueil et lui fait accepter les fleurs (v. 12214-12943) ; puis lui enseigne en un long discours tout ce que peut savoir une proxénète, instruite de son métier par les folies de sa jeunesse, l’expérience de son âge mûr et la lecture d’Ovide, tout ce que doit connaître une jeune courtisane pour tirer le plus grand profit de sa beauté, plaire aux hommes, les tromper et les « plumer » (v. 12944-14746).

Bel-Accueil refuse de suivre les mauvais conseils de son indigne surveillante, mais consent à voir le jeune homme, à condition qu’il ne lui demandera rien de messéant. Jalousie étant sortie de la ville, la Vieille introduit l’amant, qui, se méprenant sur les amabilités de Bel-Accueil, veut s’emparer de la rose. Danger et à sa suite Peur et Honte accourent, punissent Bel-Accueil et expulsent le jeune homme (v. 14747-15336).

Ici Jean de Meun ouvre une parenthèse pour demander à ses lecteurs, s’il a dit paroles

Semblant trop baudes[1] ou trop foles,

  1. Gaillardes.