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SUR VILLE-HARDOUIN

avoient si long-temps souffert. Ses réglemens portent le caractère de la plus haute sagesse. Il voulut que les seigneurs grecs conservassent à sa cour les mêmes honneurs dont ils avoient été revêtus sous les empereurs de leur nation. Sans cesser d’être reconnoissant envers les Français et les Vénitiens, auxquels il devoit le trône, et sans manquer aux engagemens qu’il avoit pris avec eux, il admit le peuple vaincu dans les places de la magistrature et dans les rangs de son armée, paroissant n’accorder les distinctions qu’au mérite reconnu, quoique le dévouement fût à ses yeux le premier et le plus imposant de tous les titres. Donnant l’exemple de la plus haute piété, il ne souffrit point de persécutions religieuses. Persuadé que le schisme ne pouvoit s’éteindre que graduellement, et par des moyens doux, il permit au clergé grec de suivre ses anciens usages, et lui assigna des églises et des monastères. En 1210, il réprima le zèle trop ardent de Pélage, évêque d’Albe et légat du Pape, qui vouloit arracher par la contrainte ce qui ne doit être obtenu que par la persuasion. Ses représentations auprès de la cour romaine eurent tout le succès qu’il devoit attendre ; et le concile de Latran, dont le principal objet étoit la réunion des deux Églises, entra pleinement dans ses vues. Les Grecs désiroient que chaque diocèse eût deux évêques de l’un et l’autre rit. Cette concession, qui auroit perpétué les divisions, troublé les consciences, et détruit à la longue la véritable piété, ne pouvoit être agréée par l’Empereur. D’après ses instances, le concile décida qu’il n’y auroit qu’un évêque par province, mais que ce prélat établiroit en faveur de chaque nation des personnes