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SUR VILLE-HARDOUIN

loin de croire terminée, eût une fin si prompte et si heureuse, nommèrent sur-le-champ une députation chargée d’aller trouver l’Empereur, et de lui faire ratifier les conventions conclues avec le prince Alexis. Cette députation fut composée de Ville-Hardouin, de Mathieu de Montmorency, et de deux Vénitiens. Les députés furent reçus dans la ville avec de grandes acclamations : conduits au palais de Blaquernes, ils y trouvèrent une Cour aussi nombreuse que brillante. « À peine on pouvoit s’y tourner, dit naïvement Ville-Hardouin, car tous ceux qui le jour précédent avoient été contre Isaac, étoient ce jour-là sous son obéissance. »

L’Empereur admit en particulier les ambassadeurs. Ville-Hardouin, chargé de porter la parole, le pria de confirmer le traité fait avec son fils, et lui en expliqua les dispositions, qui le consternèrent. Elles consistoient à payer deux cent mille marcs d’argent, somme énorme pour ce temps, à fournir l’armée de vivres pendant un an, à entretenir cinq cents chevaliers dans la Terre-Sainte, à y servir lui-même ou son fils, pendant une année, avec dix mille hommes, enfin à remettre l’empire d’Orient sous l’obéissance du Saint-Siége. Cette dernière clause étoit la plus rigoureuse et la plus difficile à exécuter, parce que les Grecs, animés par leur clergé, avoient une aversion presque invincible pour la cour de Rome ; cependant Ville-Hardouin ayant insisté avec force, l’Empereur crut devoir céder à la nécessité. « Quand on vous donneroit tout l’Empire, lui dit-il, vous l’avez bien mérité. »

Quelques jours après, le prince Alexis fit son entrée