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NOTICE

leur proposa de passer avec lui en Asie pour remettre sous l’obéissance de l’Empire les provinces qui tenoient encore pour l’usurpateur.

Une proposition de ce genre ne pouvoit qu’être accueillie avec transport par les chevaliers français et les Vénitiens. Au moment où les préparatifs se faisoient, l’armée perdit un de ses chefs les plus chéris. Mathieu de Montmorency, qui s’étoit distingué dans toutes les occasions importantes, qui avoit partagé avec Ville-Hardouin les missions les plus honorables, mourut d’une maladie, suite de ses fatigues. Ses derniers sentimens furent ceux d’un héros chrétien ; et « cette perte, dit Ville-Hardouin, fut très-sensible, quoique causée par la mort d’un seul homme. »

Le doge de Venise, le plus expérimenté de tous les chefs de la croisade, ne voulut pas qu’on cédât imprudemment au vœu général de suivre Alexis en Asie. Il fit sentir que la capitale étoit à peine soumise, que l’empereur Isaac, séparé de son fils et des meilleures troupes, pourroit courir de grands dangers, et, qu’il étoit à craindre que, pendant qu’on soumettroit des provinces éloignées, le siège de l’Empire ne tombât au pouvoir d’un usurpateur. Alexis n’emmena donc avec lui qu’une division de l’armée, commandée par le marquis de Montferrat, qui lui avoit voué beaucoup d’attachement depuis qu’il l’avoit vu en Italie, et qui d’ailleurs étoit uni avec lui par les liens du sang. Ville-Hardouin, le doge et les autres chefs restèrent à Stenon avec la plus grande partie de l’armée, dont le commandement fut donné à Baudouin, comte de Flandre.

L’événement prouva bientôt la sage prévoyance du