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SUR DU GUESCLIN.

personne de sa propre femme, la credulité superstitieuse qu’il avoit eüe pour les juifs, et le secours qu’il étoit allé chercher chez les Infidelles, dont il avoit embrassé la malheureuse secte ; il vit bien qu’il avoit comblé la mesure de ses iniquitez, et que le ciel, pour le punir de touttes ses impietez et de tous ses crimes, l’alloit livrer entre les mains de son ennemy, qui, bien loin de luy pardonner, se feroit un plaisir de le faire mourir, pour n’avoir plus de competiteur à la couronne, et regner ensuite dans une securité profonde. Il faisoit reflexion sur l’état pitoyable auquel l’avoient réduit Bertrand, le Besque de Vilaines, et les autres partisans d’Henry, qui, sans eux, auroit succombé nécessairement sous les forces qu’il avoit amenées du royaume de Belmarin. Ce malheureux Roy tomba dans une grande perplexité d’esprit, voyant qu’à moins qu’il n’eût des aîles pour voler comme les oiseaux, il ne pouvoit aucunement échapper des mains de ses ennemis. Les vivres manquoient dans la place, et les assiegez n’étoient point en état de faire de sorties, ny de forcer aucun quartier. D’ailleurs, pour rendre la prise de Pierre immanquable, Henry fit batir un mur assez haut tout autour du château de Montiel, et les assiegeans veilloient avec touttes les precautions imaginables afin que personne n’entrât dedans, ny n’en sortît. Pierre voyant que la garnison, pressée par la famine, parloit secrettement de se rendre et de le livrer, il assembla les principaux officiers qui commandoient sous luy dans ce château, les conjura de tenir encore durant quinze jours, et les assûra qu’avant que ce terme fut expiré, il leur ameneroit un secours si considérable, qu’il tailleroit les assie-