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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

il ne balança plus sur la liberté des princes. Je conviens que comme tous les hommes irrésolus de leur naturel ne se déterminent que difficilement pour les moyens, quoiqu’ils soient déterminés pour la fin, il auroit été long-temps à porter la résolution jusqu’à la pratique, si je ne lui en eusse ouvert le chemin. Je vous rendrai compte de ce détail après avoir parlé de deux aventures assez bizarres que j’eus en ce temps-là.

Le cardinal Mazarin, étant revenu à Paris, ne songea qu’à diviser la Fronde ; et les manières de madame de Chevreuse lui en donnoient assez d’espérance car quoiqu’elle connût très-bien qu’elle tomberoit à rien si elle se séparoit de moi, elle ne laissoit pas de se ménager soigneusement à toutes fins avec la cour, et de lui laisser croire qu’elle étoit bien moins attachée à moi par elle-même, que par l’opiniâtreté de mademoiselle sa fille. Le cardinal, persuadé qu’il m’affoibliroit beaucoup auprès de Monsieur s’il m’ôtoit madame de Chevreuse, pour qui il avoit une inclination naturelle, pensa de plus qu’il feroit un grand coup pour lui s’il me pouvoit brouiller avec mademoiselle de Chevreuse ; et il crut qu’il n’y avoit point de plus sur moyen que de me donner un rival qui lui fût plus agréable. Il pensa qu’il réussiroit mieux par M. d’Aumale, qui étoit beau comme un ange, et qui pouvoit aisément convenir à la demoiselle par la sympathie.. Il s’étoit entièrement donné au cardinal, contre les intérêts mêmes de M. de Nemours son aîné et il se sentit très-honoré de la commission qu’on lui donna. Il s’attacha donc à l’hôtel de Chevreuse, et se conduisit d’abord si bien que je ne balançai pas à