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[1650] MÉMOIRES

de peu de sens : de plus, les plus fins y sont trompés.

M. le cardinal Mazarin, qui avoit pris goût pour la seconde fois aux acclamations du peuple quand le Roi revint de Guienne, s’en lassa dans peu de jours. Les frondeurs n’en tinrent pas moins le pavé ; mais je n’en étois pas moins souvent à l’hôtel de Chevreuse, qui est à présent l’hôtel de Longueville, et qui n’est qu’à cent pas du Palais-Royal, où le Roi logeoit. J’y allois tous les soirs, et mes vedettes se posoient régulièrement à vingt pas des sentinelles des gardes ; j’en ai encore honte quand j’y pense ; mais ce qui m’en faisoit dans le fond du cœur dès ce temps-là paroissoit grand au vulgaire, parce qu’il étoit haut, et excusable aux autres, parce qu’il étoit nécessaire. On pouvoit dire qu’il n’étoit pas nécessaire que j’allasse à l’hôtel de Chevreuse ; mais presque personne ne le disoit, tant l’habitude a de force, particulièrement dans la faction, en faveur de ceux qui ont gagné les cœurs ! Souvenez-vous de ce que je vous ai dit dans le premier livre de cet ouvrage sur ce sujet. Il n’y avoit rien de si contraire à tout ce qui se passoit à l’hôtel de Chevreuse, que les confirmations, les conférences de Saint-Magloire, et autres telles occupations. Mais j’avois trouvé l’art de les concilier ; et cet art justifie, à l’égard du monde, ce qu’il concilie.

Le cardinal, fatigué des alarmes que l’abbé Fouquet commençoit à lui donner à Paris pour se rendre nécessaire auprès de lui, et entêté de sa capacité pour le gouvernement d’une armée, sortit en ce temps-là assez brusquement de Paris pour aller en campagne, et reprendre Rethel et Château-Portien, que les ennemis avoient occupés, et dans lesquels M. de Tu-