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[1651] MÉMOIRES

compte : car je n’ignorois pas que, tant que la délibération ne se feroit point, elle pourroit toujours retomber sur ce qui ne me convenoit pas. La place dans laquelle j’opinois, qui étoit justement entre la grand’chambre et les enquêtes, me donna le temps de faire mes réflexions et de prendre mon parti, qui fut de traiter de satire et de libelle l’écrit qui avoit été dressé contre moi par le cardinal de réveiller par quelque passage court, mais curieux, l’imagination des auditeurs, et de remettre ensuite la délibération dans son véritable sujet. Comme la mémoire ne me fournissoit rien dans l’antiquité qui eût rapport à mon dessein, je fis un passage d’un latin le plus pur et le plus approchant des anciens qui fût en mon pouvoir, et je formai mon avis en ces termes :

« Si le respect que j’ai pour messieurs les préopinans ne me fermoit la bouche, je ne pourrois m’empêcher de me plaindre de ce qu’ils n’ont pas relevé l’indignité de cette paperasse qu’on vient de lire dans cette compagnie, contre toutes les formes, et que l’on voit conçue dans les mêmes caractères qui ont profané le sacré nom du Roi pour animer les témoins à brevet. Je pense qu’ils ont cru que ce libelle, qui n’est qu’une saillie de la fureur de M. le cardinal Mazarin, étoit trop au dessous d’eux et de moi. Je n’y répondrai, messieurs, pour m’accommoder à leurs sentimens, que par le passage d’un ancien[1] qui me vient dans l’esprit : Dans les

  1. Le passage d’un ancien : Voici la phrase latine que prononça le coadjuteur In difficillimis reipublicæ temporibus, urbem non deserui in prosperis, nihil de publico delibavi ; in desperatis, nihil timui.