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DU CARDINAL DE RETZ. [1651]

toujours oublié de parler de ce détail à M. le prince, qui seul le pouvoit éclaircir.

Je reviens à ma conférence avec la Reine elle : dura jusqu’à deux heures après minuit, et je crus voir clairement, dans son cœur et dans son esprit, qu’elle craignoit le raccommodement avec M. le prince ; qu’elle souhaitoit, avec une extrême passion, que M. le cardinal en quittât la pensée, à laquelle il donnoit, disoit-elle, par excès de bonté, comme un innocent ; et qu’elle ne comptoit pas pour un grand malheur la guerre civile. Comme elle convenoit pourtant que le plus court seroit d’arrêter, s’il étoit possible, M. le prince, elle me commanda de lui en expliquer les moyens. Je n’ai jamais pu savoir la raison pour laquelle elle n’approuva pas celui que je lut proposai, qui étoit d’obliger Monsieur d’exécuter la chose chez lui. J’y avois trouvé du jour, et je savois bien que je ne serois pas désavoué ; mais elle n’y voulut jamais entendre, sous prétexte que Monsieur ne seroit jamais capable de cette résolution, et qu’il y auroit même trop de péril à la lui communiquer. Je ne sais non plus si elle ne craignit point que Monsieur, ayant fait un coup de cet éclat, ne s’en servît ensuite contre elle-même. Je ne sais non plus si ce que d’Hocquincourt me dit de l’offre qu’il lui avoit faite de tuer M. le prince en l’attaquant dans une rue, ne lui avoit pas fait croire que cette voie étoit encore plus décisive. Enfin elle rejeta absolument celle de Monsieur, qui étoit infaillible, et elle me commanda de conférer avec d’Hocquincourt, « qui vous dira, ajouta-t-elle, qu’il y a des moyens plus sûrs que celui que vous proposez. »