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[1651] MÉMOIRES

Je vis d’Hocquincourt le lendemain à l’hôtel de Chevreuse, qui me conta familièrement tout le particulier de l’offre qu’il avoit faite à la Reine. J’en eus horreur ; et je suis obligé de dire, pour la vérité, que madame de Chevreuse n’en eut pas moins que moi. Ce qui est d’admirable, c’est que la Reine, qui m’avoit renvoyé à lui la veille comme à un homme qui lui avoit fait une proposition raisonnable, nous témoigna, à madame de Chevreuse et à moi, qu’elle approuvoit fort nos sentimens, qui étoient assurément bien éloignés d’une action de cette nature. Elle nous nia même absolument qu’Hocquincourt la lui eût expliquée ainsi. Voilà le fait sur lequel vous pouvez fonder vos conjectures. M. de Lyonne m’a dit depuis qu’un quart-d’heure après que madame de Chevreuse eut dit à la Reine que j’avois rejeté avec horreur la proposition d’Hocquincourt, la Reine dit à Senneterre, à propos de rien : « Le coadjuteur n’est pas si hardi que je le croyois. » Et le maréchal Du Plessis me dit dans le même moment, à propos de rien aussi, que le scrupule étoit indigne d’un grand homme. Je n’appliquai pas cette parole en ce temps-là ; mais ce qui me l’a fait observer depuis, et ce qui m’a toujours fait croire que le maréchal savoit et approuvoit même l’entreprise d’Hocquincourt, est que M. le duc de Vitry m’a dit plus d’une fois que madame d’Ormail, parente et intime amie du maréchal, l’avoit envoyé querir en ce temps-là, lui M. de Vitry, à Aigreville ; et qu’elle lui avoit proposé à Picpus, où il étoit venu à sa prière, d’entrer avec le maréchal dans une entreprise contre la personne de M. le prince. Elle s’adressoit bien mal : car je n’ai jamais