Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/340

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Si le compliment que Monsieur faisoit faire à la Reine eût été fait par une personne moins adroite que madame la palatine, j’eusse été encore beaucoup plus en peine de l’événement. Elle le ménagea si habilement, qu’il servit au lieu de nuire. À quoi elle fut très-bien servie elle-même par la fortune, qui fit arriver ce messager dont je viens de vous parler justement au moment où il étoit nécessaire pour rectifier ce qu’il ne tenoit pas à Monsieur de gâter : car la Reine, qui étoit toujours soumise à M. le cardinal Mazarin, mais qui l’étoit doublement quand ce qu’il lui mandoit convenoit à sa colère, se trouva, lorsque madame la palatine commença à lui parler, dans une pensée si éloignée d’aucun accommodement avec M. le prince, que ce que la palatine lui dit de la part de Monsieur ne produisit en elle d’autres mouvemens que ceux que nous pouvions souhaiter, qui étoient de faire donner la carte blanche à Monsieur, et de l’obliger à se confesser, pour ainsi dire, de son balancement ; d’y chercher des excuses, mais de celles qui assuroient l’avenir, et de désirer avec impatience de me parler. Madame la palatine fut même chargée par la Reine de lui faire savoir par mon canal le détail de la dépêche du messager, et de me commander d’aller, entre onze heures et minuit, au lieu accoutumé. Madame la palatine ne douta pas, non plus que moi, que Monsieur ne dût avoir beaucoup de joie de ce que je lui allois porter. Nous nous trompâmes beaucoup l’un et l’autre car aussitôt que je lui eus dit que la Reine lui offrait tout sans exception, pourvu qu’il voulût s’unir de son côté sincèrement et parfaitement elle contre M. le prince, il tomba dans un