Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/417

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airs ; elle en parla à madame de Chevreuse, qui fit la surprise et l’étonnée ; mais qui ne la fit qu’autant qu’il fallut pour mieux jouer son jeu, en faisant semblant de revenir de loin, et de faire, à cause de ce que la Reine lui en disoit, des réflexions auxquelles elle n’auroit jamais pensé sans cela, sur ce qu’elle avoit remarqué, en arrivant à Paris, de mes emportemens contre le cardinal. « Il est vrai, madame, disoit-elle à la Reine que Votre Majesté me fait ressouvenir de certaines circonstances qui se rapportent assez à ce que vous dites. Le coadjuteur me parloit des journées entières de toute la vie passée de Votre Majesté avec une curiosité qui me surprenoit, parce qu’il entroit même dans le détail de mille choses qui n’avoient aucun rapport au temps présent. Ces conversations étoient les plus douces du monde, tant qu’il ne s’agissoit que de vous. Il n’étoit plus le même homme s’il arrivoit par hasard que l’on nommât M: le cardinal ; il disoit même des rages de Votre Majesté ; et puis tout d’un coup il se radoucissoit, mais jamais pour M. le cardinal. Mais, à propos, il faut que je rappelle dans ma mémoire la manie qui lui monta un jour dans la tête contre Buckingham : je ne m’en ressouviens pas précisément. Il ne pouvoit souffrir que je disse qu’il étoit fort honnête homme. Ce qui m’a toujours empêché de faire réflexion sur mille et mille choses de cette nature que je vois d’une vue est l’attachement qu’il a pour ma fille. Ce n’est pas dans le fond que cet attachement soit si grand qu’on le croit : je voudrois bien que la pauvre créature n’en eût pas plus pour lui qu’il en a pour elle. Sur le