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de me dire à moi-même, plus d’une fois que l’on ne peut assez peser les moindres mots dans les plus grandes affaires.

Je reviens à la lettre que Croissy m’apporta à Grotta-Ferrata. J’en fus surpris ; mais de cette sorte de surprise qui n’émeut point. J’ai toute ma vie senti que ce qui est incroyable a fait toujours cet effet en moi. Ce n’est pas que je ne sache que ce qui est incroyable est souvent vrai ; mais comme il ne le doit pas être dans l’ordre de la prévoyance, je n’ai jamais pu en être touché, parce que j’en ai toujours considéré les événemens comme des coups de foudre qui ne sont pas ordinaires, mais qui peuvent toujours arriver. Nous fîmes toutefois de grandes réflexion, Croissy, l’abbé Charier et moi, sur cette lettre. J’envoyai celui-ci à Rome en communiquer le contenu avec M. le cardinal Azolin qui ne fit pas grand cas des paroles du Pape, sur lesquelles M. de Lyonne faisoit tant de fondement, et qui dit à l’abbé Charier, très-habilement et très-sensément, qu’il étoit persuadé que de Lyonne, qui avoit intérêt de couvrir ou plutôt de déguiser et de réparer à la cour de France la prise du pallium, grossissoit les paroles et les promesses de Sa Sainteté, qui d’ailleurs, ajouta Azolin, est le premier homme du monde à trouver des expressions qui montrent tout et qui ne donnent rien. Il me conseilla de retourner à Rome, et de faire bonne mine ; de continuer à témoigner au Pape une parfaite confiance en sa justice et en sa bonne volonté, et d’aller, mon chemin comme si je ne savois rien de ce qu’il avoit dit à de Lyonne. Je le crus j’en usai ainsi.

Je déclarai, en y arrivant, selon ce que mes amis m’a-