Aller au contenu

Page:Pierre de Fenin - Mémoires.djvu/35

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quant au style de cette chronique, quelques négligences, de fréquentes répétitions de mots et de phrases, le rendent peu facile, et la narration, qui laisse trop apercevoir, si l’on peut s’exprimer ainsi, le travail de réduction d’une histoire plus étendue, ne rend pas le défaut moins sensible. Mais si l’auteur, après avoir traité de faits généraux, sur lesquels il passe rapidement, arrive aux détails de quelque combat, au tableau du siége ou de la prise d’une ville, alors son style devient plus coulant, son récit n’est pas dépourvu d’intérêt. Il trouve des expressions simples et claires, parfois naïves. Ces qualités sont, en général, plus sensibles lorsqu’il en vient à émettre son opinion sur l’un des personnages qu’il a mis en scène. Veut-il, par exemple, dépeindre l’état de foiblesse morale dans lequel languissoit Charles VI lors de la prise de Paris ? « le Roy, dit-il, estoit de tout content, et de Bourguignons et d’Ermignas, et peu luy chaloit comme tout allast. » Trace-t-il le portrait de Charles VII ? « il estoit de sa personne mout bel prince et biau parleur à toutes personnes, et estoit piteux envers povres gens ; mais il ne s’armoit mie vollentiers et n’avoit point chier la guerre, s’il s’en eust peu passer. » On ne peut, ce nous semble, faire plus naïvement l’éloge, tout à la fois, et la critique de ce prince efféminé auquel les extrémités les plus désespérées eurent seules le pouvoir de rendre l’énergie nécessaire