Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/157

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et refuse de se prêter à ce que les courtisans appellent des affaires : commerce injurieux au mérite, scandaleux pour le public, avilissant pour l’autorité, dangereux pour l’état, et malheureusement trop commun.

On loue la bonté d’un autre, parce qu’on peut le séduire, le tromper et le faire servir d’instrument à l’injustice.

Un prince passe pour sévère, parce qu’il aime mieux prévenir les fautes, que d’être obligé de les punir ; de cruauté, parce qu’il réprime les tyrannies subalternes, de toutes les plus odieuses. Les lois cruelles contre les oppresseurs sont les plus douces pour la société ; mais l’intérêt particulier se fait toujours le législateur de l’ordre public.

Louis XII, un des meilleurs, et par conséquent des plus grands rois que la France ait eus, fut accusé d’avarice, parce qu’il ne fouloit pas les peuples pour enrichir des favoris sans mérite. Le peuple doit être le favori d’un roi ; et les princes n’ont droit au superflu, que lorsque les peuples ont le nécessaire. Les reproches qu’on osoit lui faire ne prouvoient que sa bonté. On porta l’insolence jusqu’à le jouer sur le théâtre. J’aime mieux, dit ce prince honnête homme, que mon avarice les fasse rire, que si elle les faisoit pleurer. Il ajoutoit : Leurs plaisanteries