Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/225

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bles et bienfaisantes, celle qui aura le plus d’esprit l’emportera encore par la vertu pratique. Elle aura mille procédés délicats, inconnus à l’esprit borné. Elle n’humiliera point par ses bienfaits : elle aura, en obligeant, ces égards si supérieurs aux services, et qui, loin de faire des ingrats, font éprouver une reconnoissance délicieuse. Enfin, quelque vertu qu’on ait, on n’a que celle de l’étendue de son esprit.

Il arrive encore que l’esprit inspire à celui qui en est doué, une secrète satisfaction qui ne tend qu’à le rendre agréable aux autres, séduisant pour lui-même, inutile à sa fortune, et heureusement assez indifférent sur cet article.

Les gens d’esprit devroient d’autant moins s’embarrasser de la basse jalousie qu’ils excitent, qu’ils ne vivent jamais plus agréablement qu’entr’eux. Ils doivent savoir par expérience combien ils se sont réciproquement nécessaires. Si quelque pique les éloigne quelquefois les uns des autres, les sots les réconcilient, par impossibilité de vivre continuellement avec des sots.

Les ennemis étrangers feroient peu de tort aux gens de lettres, s’il ne s’en trouvoit pas d’assez imprudens pour fournir des moyens de les décrier, en se desservant quelquefois eux-mêmes.