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MÉMOIRE

se, sont toujours les premiers connus d’un peuple naissant. Tout ce qui a rapport aux exercices du corps, plaît et devient nécessaire, avant qu’on ait la moindre idée des talens de l’esprit, qui ont besoin d’une longue suite de temps, pour être cultivés ; au lieu que les combats, les joutes, les courses parviennent bientôt à la gloire dont ils sont susceptibles, et sont presqu’aussitôt perfectionnés qu’imaginés ; mais il y avoit près de quatre siècles que Rome étoit florissante, lorsqu’on y reçut la première idée des jeux scéniques.

Ce n’est pas que la poésie ne fût déjà connue des Romains ; on la vit naître chez eux, comme chez les Grecs, à l’occasion de la moisson, des vendanges, et de tout ce qui inspire la joie aux habitans de la campagne. Ils se livroient alors au plaisir, et chantoient dans leurs transports ces vers naïfs et sans art, connus sous le nom de vers fescennins, de Fescennia, ville d’Étrurie. Les louanges des dieux en faisoient d’abord la matière ; mais on y mêla dans la suite des railleries grossières.

Ces poëmes informes appelés satires, à cause de la diversité des sujets qui s’y traitoient, passèrent de la campagne à la ville, et y devinrent par conséquent moins grossiers et plus vicieux. Tout fut l’objet de cette licence, qui fut portée au point qu’elle excita souvent l’attention des