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SUR LES JEUX SCÉNIQUES.

magistrats et la sevérité des lois. Cependant, le goût de ces satires se conserva toujours à Rome ; et la perfection du poëme dramatique, qui auroit dû naturellement les faire oublier, ne put jamais les proscrire. C’est de ce poëme imparfait que la satire, inventée par Ennius, cultivée par Lucilius, et perfectionnée par Horace, emprunta son nom : telle a été la naissance de la poésie. Les arts qui, dans la suite, ont exigé le plus de délicatesse, ne sont pas ceux qui peuvent se glorifier le plus de leur origine. Les Romains étoient encore bien éloignés alors d’avoir des jeux scéniques : et, si l’on s’étonne qu’ils aient été si long-temps sans les connoître, on doit être encore plus surpris de ce qui leur donna naissance.

L’an 390 ou 391 de sa fondation, sous le consulat de C. Sulpitius Pœticus et de C. Licinius Stolon, Rome étant ravagée par la peste, on eut recours aux Dieux. Il n’y a rien que les hommes, dans le paganisme, n’aient jugé digne d’irriter ou d’apaiser la divinité. On imagina de faire venir d’Étrurie des farceurs, dont les jeux furent regardés comme un moyen propre à détourner la colère des dieux. Ces joueurs, dit Tite-Live[1], sans réciter aucun vers, et sans aucune

  1. Sine carmine ullo, sine imitandorum carminum actu, ludiones ex Etruriâ acciti, ad tibicinis modos sal-