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Page:Pinvert - Lazare de Baïf, 1900.djvu/102

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De plus, l’inventaire fait après le décès de Lazare montre que Jean-Antoine, enfant naturel, eut à souffrir du concours des parents légitimes. Cependant, il garda la maison du faubourg Saint-Marceau et le manoir des Pins, sur lequel la famille paternelle dut abandonner ses prétentions. En tout cas, il avait reçu de Lazare deux choses non sujettes à rapport ni à discussion : une instruction solide, un nom déjà glorieux. Du Bellay, pour flatter Jean-Antoine de Baïf, ne croyait pas pouvoir mieux faire que de retrouver en lui un reflet du mérite paternel.[1] Il mettait sur le même rang Lazare de Baïf et Budé :


D’un grand Budé les uns diront la gloire,
D’un grand Baïf les autres chanteront…[2]


Et, dans la Deffence et Illustration, il s’écriait : « Ces deux lumières françoises, Guillaume Budé et Lazare de Bayf[3]... ». Ronsard aussi, dans les versiculets de l’Ode A Calliope, égalait Lazare à Budé. Toujours Budé ! Vivant, Baïf marchait sur ses traces ; mort, on rappelait naturellement le nom de Budé dans son éloge funèbre. Comme s’il était dans sa destinée que se trouvât consacré en quelque sorte par son épitaphe un parallèle trop flatteur, qui avait fait, dès les années de sa jeunesse, l’objet de son émulation secrète.

Et après tout, l’appréciation ne doit pas choquer, si on la restreint, et, en même temps, si on la complète. Humaniste, Lazare de Baïf fut une sorte de Budé en petit. Comme Budé, il aida au progrès des études latines et grecques, à la fois par ses écrits et par ses conseils. Traducteur et poète, il fit plus que Budé, en mettant la Muse française au service du théâtre

  1. Du Bellay, éd. M.-L., t. II, p. 142.
  2. Ibid., p.137.
  3. Du Bellay, La Deffence et Illustration de la Langue française, II, 12.