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NOTICE

mot de Wilamowitz[1], ces résultats sont tout au plus, aux yeux de Platon, des « opinions droites »[2] — et il faut ajouter : provisoires.

Socrate a ainsi résumé ses réflexions : « Le législateur semble créer pour chacun des êtres un signe et un nom, au moyen de lettres et de syllabes, et partir de là pour composer le reste, par imitation, avec ces mêmes éléments. » Loin d’infirmer ces conclusions, qu’elle prépare, l’étude des éléments a paru la justifier. L’entretien avec Cratyle va y apporter de fortes réserves, mais en faisant valoir des considérations toutes nouvelles.


L’imitation et la convention.

Dès le début, Socrate s’empresse de dire qu’il ne garantit rien des propos qu’il a tenus : il a simplement examiné la question de son point de vue (428 a). Depuis longtemps, il est tout le premier surpris de sa propre sagesse, à laquelle il ne peut croire. Un nouvel examen lui paraît nécessaire, car il faut prendre garde de s’abuser soi-même (428 d). C’est annoncer au lecteur que les résultats acquis dans la première partie sont sujets à caution, et appelleront des retouches.

Dans le premier entretien, Socrate a réfuté la thèse d’Hermogène, en montrant qu’il existe pour les noms une justesse naturelle qui n’est point affaire de convention. Contre Cratyle, il critique maintenant la thèse de la justesse naturelle des noms. Il avait déjà soutenu qu’il est possible de dire faux (385), mais Hermogène l’avait admis sans difficulté. La résistance de Cratyle l’oblige à reprendre cette affirmation, en l’appuyant d’une démonstration en règle. C’est ici qu’interviennent la comparaison du mot avec la peinture, et la théorie de l’imitation. Socrate en conclut que les noms peuvent être, comme les peintures, des copies inexactes, et il fixe les conditions d’un nom bien fait, c’est-à-dire juste[3].

  1. O. l., p. 295.
  2. Au reste, comme me le fait observer M. Diès, « toute explication scientifique du monde expérimental est telle aux yeux de Platon et restera telle (Timée). L’étude scientifique du langage, même conduite rigoureusement selon la méthode indiquée plus haut, n’eût jamais donné que des résultats vraisemblables ».
  3. Suivant Horn, o. l., p. 57 et suiv., Socrate découvre ici en quoi il s’était trompé lui-même (cf. 428 d). Son tort avait été de