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AXIOCHOS

et, par conséquent, de la disparition totale de la sensibilité, de l’autre, celle de l’immortalité de l’âme avec les joies de la vie future. Autour de ces hypothèses devaient se grouper les différents lieux communs depuis si longtemps en vogue : les maux de l’existence humaine, les bienfaits de la mort qui délivre des souffrances, bienfaits tels, que les dieux n’hésitent pas à soustraire aux douleurs de la terre ceux qu’ils chérissent ; la nécessité de modérer ses passions et de se soumettre au destin… Ce traité obtint un immense succès. Diogène-Laërce rapporte combien il fut admiré[1]. « Legimus omnes, écrit Cicéron, Crantoris ueteris Academici de luctu. Est enim non magnus, uerum aureolus et, ut Tuberoni Panaetius praecipit, ad uerbum ediscendus libellus[2] ». Ce fut probablement à cette époque que des écoles se spécialisèrent dans tel ou tel genre de consolation, comme nous l’apprend Cicéron[3], et que l’on commença à classer les différents thèmes et les différentes argumentations. Chaque école avait sa méthode particulière, conforme à sa tendance philosophique[4].

Nous n’avons pas à refaire, après Buresch, l’histoire des traités de consolation dans l’antiquité. Il suffit à notre but d’avoir fait connaître le milieu où a pu naître l’Axiochos. Nous avons insisté sur l’œuvre de Crantor à cause des ressemblances frappantes qui apparentent notre dialogue au de Luctu. On se demande alors si l’auteur de l’Axiochos est un précurseur ou un imitateur. Nous pourrions noter, sans doute, que les anciens se sont surtout recommandés de Crantor et ce serait déjà une présomption en faveur de l’originalité de ce dernier, mais le problème doit être examiné de plus près.

II

L’ÉPOQUE ET L’AUTEUR

Au ier siècle de notre ère, l’Axiochos était connu et passait très probablement pour un apocryphe de Platon : Thrasylle,

  1. Diog. L. IV, 27 : θαυμάζεται δὲ αὐτοῦ βιβλίον μάλιστα τὸ περὶ πένθους.
  2. Acad. II, XLIV, 135.
  3. Tuscul. III, 34, 81.
  4. Tuscul. III, 31, 76.