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NOTICE

traire à la vie[1]. Callimaque montrait la nature comme une usurière, jalouse de reprendre ses dons, et louait le sort de ceux qui ont peu vécu[2]. Épicure insistait sur le fait que la mort est la privation de toute sensibilité ; elle ne peut nous affecter, puisqu’aucun mal ne peut alors nous atteindre[3]. Très probablement, Démocrite avait, avant lui, vulgarisé cet argument[4].

Platon, au contraire, donne ses préférences à la thèse de l’immortalité et cherche dans la persistance de l’âme après la mort, des motifs de confiance et d’espoir[5]. De même Aristote, qui détaille les raisons que nous avons de croire à l’immortalité et appelle vie véritable celle où nous ne sommes plus liés à un corps mortel[6].

Ces thèmes, développés à toutes les époques, épars dans des ouvrages de forme et de tendance très diverses, furent recueillis et groupés par Crantor qui semble avoir créé le genre littéraire de la consolation. L’académicien Crantor vécut de la fin du ive siècle jusqu’après le milieu du iiie. Disciple de Démocrite et de Polémon, maitre d’Arcésilas, il est surtout resté célèbre par son traité sur le Deuil (περὶ πένθους), dont l’influence fut très grande. Nous ne possédons plus cet ouvrage, mais grâce principalement à l’utilisation qui en a été faite par Plutarque dans la Consolation à Apollonios et par Cicéron au 1er livre des Tusculanes, il nous est possible d’en retrouver les grandes lignes[7]. Le περὶ πένθους, destiné à Hippoklès pour le consoler de la mort de ses enfants, était une sorte d’exhortation où l’auteur avait accumulé tous les motifs propres à calmer la douleur de son ami, même les motifs les plus opposés entre eux. C’est ainsi qu’il semble avoir, comme le Socrate de l’Apologie platonicienne, maintenu d’une part l’hypothèse de l’anéantissement total de l’homme

  1. Tusculanes I, 83, 84.
  2. Tusculanes I, 39, 93.
  3. Lettre à Ménécée, 124, 125, 126.
  4. Cicéron, Tusculanes I, 82.
  5. Phédon 115 c-116 a.
  6. Voir les fragments d’Eudème, dans l’édition de Berlin, V, fg. 33, 36.
  7. Pohlenz, à l’aide de ces imitations anciennes, a essayé de reconstituer la suite des idées dans le traité de Crantor, Cf. De Ciceronis Tusculanis disputationibus, Göttinger, Preisverteilungsprogr. 1909.