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Page:Platon - Sophiste ; Politique ; Philèbe ; Timée ; Critias (trad. Chambry), 1992.djvu/285

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ec nous tous et qui t’es engagé à déterminer quel est pour l’homme le bien par excellence. Or, Philèbe ayant dit que c’était le plaisir, l’agrément, la joie et toutes les choses de ce genre, toi, tu as soutenu, au contraire, que ce n’étaient pas ces choses-là, mais d’autres. Nous nous remémorons souvent tout cela exprès et nous avons de bonnes raisons de le faire : nous voulons avoir ces deux sortes de biens présents dans notre mémoire, afin de les soumettre à l’examen. Toi, à ce que je vois, tu affirmes que le bien qui méritera d’être proclamé supérieur au plaisir, c’est l’esprit, la science, l’intelligence, l’art et tous les autres biens de la même famille, et que ce sont ceux-là qu’il faut acquérir, non les autres. La dispute s’étant engagée sur ces deux assertions, nous t’avons menacé en badinant de ne pas te laisser rentrer chez toi, avant que la discussion de ces deux thèses fût parvenue à une conclusion satisfaisante. Tu y as consenti et tu t’es mis à notre disposition pour cela. Aussi, nous te disons, comme les enfants, qu’il ne faut pas reprendre ce qu’on a bien voulu donner. Cesse donc de t’opposer, comme tu fais, à ce que nous disons à présent.

SOCRATE

Que veux-tu dire ?

PROTARQUE

Que tu nous jettes dans l’embarras et que tu nous poses des questions auxquelles nous ne pouvons pas donner sur-le-champ de réponse satisfaisante. Il ne faut pas, en effet, nous imaginer que l’embarras où toute la compagnie se voit réduite en ce moment doive terminer la discussion ; si nous sommes hors d’état de répondre, c’est à toi de le faire ; car tu nous l’as promis. C’est à toi de décider ici si tu dois diviser le plaisir et la science en leurs espèces ou y renoncer, au cas que tu puisses et veuilles éclaircir de quelque autre façon l’objet de notre contestation.

SOCRATE

Je n’ai plus lieu d’appréhender aucun mauvais traitement de votre part, après ce que tu viens de dire ; car les mots «au cas que tu le veuilles» me délivrent de toute crainte à cet égard. Et puis il me semble qu’une divinité a éveillé en moi le souvenir de certaines choses.

PROTARQUE

Comment et quelles choses ?

SOCRATE

X. — Je me souviens en ce moment d’avoir entendu dire autrefois, en songe ou peut-être même étant éveillé, à propos du plaisir et de la sagesse, que ni l’un ni l’autre n’est le bien, mais que c’est une troisième chose, différente