Il n’y a dès lors pas apparence que les dieux connaissent le plaisir ni son contraire.
Non, assurément, il n’y a pas apparence ; car ni l’un ni l’autre ne sied aux dieux. Mais nous reviendrons une autre fois sur ce point, si cela peut servir à notre propos, et nous mettrons cela au compte de l’intelligence pour le second prix, si nous ne pouvons pas le porter en compte pour le premier.
Tu ne dis rien que de très juste.
XIX. — La seconde classe de plaisirs, qui, nous l’avons dit, est propre à l’âme seule, doit entièrement sa naissance à la mémoire.
Comment cela ?
Il faut d’abord, semble-t-il, rechercher ce qu’est la mémoire, et peut-être même, avant la mémoire, ce qu’est la sensation, si nous voulons élucider comme il faut la question.
Comment dis-tu ?
Pose comme certain que, parmi toutes les affections que notre corps éprouve, les unes s’éteignent dans le corps avant de parvenir à l’âme et la laissent impassible, et que les autres vont du corps à l’âme et y causent une sorte d’ébranlement propre à chacun et commun à l’un et à l’autre.
Soit, posons.
Et si nous disons que celles qui ne passent point par les deux échappent à notre âme et que celles qui passent par les deux ne lui échappent pas, ne parlerons-nous pas très congrûment ?
Sans contredit.