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Page:Platon - Sophiste ; Politique ; Philèbe ; Timée ; Critias (trad. Chambry), 1992.djvu/309

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Commençons donc par considérer ce point. S’il est vrai, comme nous l’avons dit, qu’il y a douleur quand les animaux se corrompent, et plaisir quand ils reviennent à la santé, demandons-nous, lorsqu’il n’y a ni corruption ni rétablissement, quel doit être, dans ces conditions, l’état de tout animal. Fais bien attention à ce que tu vas répondre. N’est-il pas de toute nécessité qu’aucun être vivant, tant qu’il reste dans ces conditions, ne ressente ni douleur, ni plaisir, ni petit, ni grand[1] ?

PROTARQUE

C’est de toute nécessité, certainement.

SOCRATE

N’avons-nous pas là un troisième état, différent de celui où l’on jouit et de celui où l’on souffre ?

PROTARQUE

Sans contredit.

SOCRATE

Eh bien, maintenant, tâche de t’en souvenir. Car, pour juger du plaisir, il ne sera pas sans importance que nous nous en souvenions ou non. Encore un mot, si tu veux bien, pour en finir avec la question.

PROTARQUE

Dis ce que tu as à dire.

SOCRATE

Tu sais que, quand un homme a choisi la vie sage, rien ne l’empêche de vivre de cette manière.

PROTARQUE

Tu veux dire la vie exempte de plaisir et de douleur ?

SOCRATE

Nous avons dit, en effet, au moment où nous comparions les genres de vie, qu’on ne devait éprouver aucun plaisir, soit grand, soit petit, quand on avait pris le parti de vivre selon la raison et la sagesse.

PROTARQUE

Oui, nous l’avons dit.

SOCRATE

Cet état serait donc le sien ; et peut-être ne serait-il pas surprenant que, de tous les genres de vie, ce fût là le plus divin.

PROTARQUE
  1. Cf. République, 583 c : « Ne peut-on pas dire qu’il y a un état où on ne sent ni joie ni peine ? — Si, assurément. — Et qu’entre ces deux sentiments, à égale distance de l’un et de l’autre, il y a une sorte de repos de l’âme par rapport à chacun d’eux ? »