Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/167

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ces princes qui, pour faire valoir leurs bienfaits, les mettaient au prix de mille difficultés, et croyaient les honneurs plus agréables à recevoir, si le désespoir de les obtenir, l’ennui de les attendre, et des retardements semblables à un refus, y attachaient d’abord une sorte de flétrissure et d’humiliation ! La bienséance ne nous permet pas de redire les éloges dont vous nous avez comblés l’un et l’autre, ni comment vous nous avez égalés, pour notre amour du bien, pour notre amour de la république, aux illustres consuls des temps passés. Était-ce ou non avec justice ? nous n’oserions le décider : le respect défend de contester une chose affirmée par vous ; et notre modestie souffrirait de reconnaître pour nous-mêmes un si magnifique témoignage. Vous toutefois, César, vous êtes digne de faire des consuls auxquels vous puissiez le rendre. Pardonnez-nous si, parmi tous vos bienfaits, le plus agréable à nos yeux, c’est qu’il vous ait plu que nous fussions encore une fois collègues. Ainsi le demandaient notre tendresse mutuelle, la conformité de nos habitudes, l’accord parfait de nos vues ; accord dont la force est telle, que la ressemblance de nos mœurs diminue la gloire de notre union, et qu’il serait aussi étonnant de voir l’un de nous en opposition avec son collègue, que de le voir opposé à lui-même. Ce n’est donc pas un sentiment éphémère et subit qui fait que nous nous réjouissons du consulat l’un de l’autre, comme si c’était pour chacun de nous un consulat de plus : il y a pourtant cette différence, que ceux qui redeviennent consuls après l’avoir été sont honorés deux fois, mais en des temps divers ; tandis que nous recevons, que nous exerçons deux consulats en même temps, et que chacun de nous, étant consul dans son ami, l’est une première et une seconde fois tout ensemble.

XCII. Faveur non moins signalée ! nous étions préfets du trésor, et c’est avant de nous donner un successeur que vous nous avez donné le consulat. Un honneur s’est accru d’un honneur nouveau : notre dignité n’a pas été continuée seulement, mais doublée ; et un pouvoir a prévenu la fin de l’autre, comme si c’eût été peu qu’il la suivît. Vous avez compté assez fermement sur notre intégrité, pour ne pas craindre de manquer à votre amour de l’ordre, en ne nous laissant point dans la condition privée après l’exercice d’une charge impor-