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TROISIÈME ENNÉADE.

substance de l’homme (τὸ ὑποϰείμενον) qu’il faut chercher la cause [qui empêche l’intelligence et la raison de dominer en nous]. Mais [la substance de l’homme étant composée d’une raison séminale et d’une matière], il semble au premier abord qu’il faut chercher la cause de ce fait dans la matière plutôt que dans la raison [séminale], et que ce qui domine en nous, ce n’est point la raison [séminale], mais la matière et la substance constituée de telle ou telle manière ; cependant, il n’en est pas ainsi : ce qui remplit le rôle de substance à l’égard du principe supérieur [de l’intelligence et de la raison], c’est à la fois la raison [séminale], et ce qui est engendré par cette raison, et ce qui est selon cette raison ; par conséquent, ce n’est point la matière qui domine en nous, non plus que notre constitution corporelle.

En outre, on peut rapporter le caractère de chacun de nous (τὸ τοίονδε εἶναι) à une vie antérieure : on dira alors que notre raison [séminale] a dégénéré par suite de nos antécédents, que notre âme a perdu de sa force en illuminant ce qui était au-dessous d’elle. D’ailleurs notre raison [séminale] contient en elle-même la raison même de la matière dont nous avons été faits, matière qu’elle trouve ou qu’elle rend conforme à sa nature[1]. En effet, la raison [séminale] d’un bœuf ne réside en aucune autre matière qu’en celle d’un

  1. Voy. Platon, Timée, p. 42. Dans son Commentaire, Ficin expose la pensée de Plotin d’une manière un peu plus claire : « Quod non solum intelligentes communiter, sed etiam rationis quandoque fulgor in animabus mieare minime videatur, in causa est vel perversa nimium corporis compositio, tum inepta frequenter ingenio, tum perturbationi parata, vel forte ratio se mina lis animæ jamdiu in habitum conversa brutalem, atque subinde corpus in materia prout fert opportunitas sibi brutale conformans (si modo potentia genitalis primam corpori qualitatem affert), ut anima tune non talis evadat omnino qualis nanciscatur et corpus, sed tale sibi fingat corpus qualem naturam ipsa sibi jam conceperit, ut merito in se facta deterior in deteriorem vitam transferatur et sortem ». Voy. aussi Enn. II, liv. III, § 10, 11, 15. 16.