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AVERTISSEMENT.

disciples et par les commentateurs arabes, mais aussi les nombreuses analogies qui se rencontrent entre certains auteurs chrétiens et notre philosophe[1] ; et peut-être cette dernière partie de notre tâche ne sera-t-elle ni la moins neuve ni la moins intéressante. On savait bien, il est vrai, qu’une étroite affinité unit dès l’origine le Platonisme et le Christianisme, si bien que le savant et pieux Baronius a pu dire que l’Académie était le vestibule de l’Église, et que l’orthodoxe Baltus crut nécessaire de justifier les saints Pères à cet égard[2] ; on savait aussi, par les déclarations et les citations de quelques auteurs chrétiens[3], que les écrits de Plotin ne leur étaient pas inconnus ; mais nous étions loin de soupçonner, avant les recherches dont nous consignons ici les résultats, jusqu’où s’étendaient les services que ces écrits ont pu leur rendre.

Pour ne parler que d’un seul des Pères, mais de celui qui est le plus important de tous, parce que c’est celui qui a le plus contribué à constituer l’enseignement théologique dans l’Église latine, pour ne parler, disons-nous, que de saint Augustin, nous avons pu reconnaître que ce Père, qui du reste ne cite jamais Plotin qu’avec honneur[4], lui a emprunté, non seulement quelques pensées détachées, mais la meilleure partie de sa doctrine sur la Providence[5], les principes de la théorie qu’il expose sur le Temps et l’Éternité[6], ainsi que presque toute sa doctrine psychologique[7].

Et qu’on ne s’étonne pas des nombreuses analogies qui se rencontrent entre le docteur de l’Église et le philosophe païen : saint Augustin lui-même va nous les expliquer. D’un côté, en effet, ce Père nous déclare que, dans son ardent désir d’atteindre la vérité, il est résolu à consulter la raison aussi bien que la foi, et ce sont les Platoniciens qu’il va consulter, avec la confiance de trouver chez eux des vérités qui soient d’accord avec les Saintes Écritures[8] ;

  1. Voy. pour les Néoplatoniciens, p. 519, 542, 584, 606 ; pour les philosophes arabes, Maïmonide et Ibn-Gébirol, p. 170, 597 ; pour les écrivains chrétiens, notamment pour S. Grégoire de Nysse, S. Denys l’Aréopagite, Théodoret, Némésius, Synésius, Énée de Gaza, p. 520, 552, 585 ; pour S. Augustin, Boèce, Cassiodore, p. 523, 552, 588, 593, 600, 607, etc.
  2. Défense des Pères accusés de Platonisme, par le P. Ballas, jésuite.
  3. Voy. à cet égard les indications déjà données dans la Préface de notre 1er vol., p. XXXII.
  4. Voy. la Préface du 1er vol., p. XXX.
  5. Voy. ci-après, p. 523.
  6. Voy. ci-après, p. 549.
  7. Voy. ci-après, p. 588-592.
  8. « Ita sum affectus ut quid sit verum non credendo solum, sed etiam intelligendo apprehendere impatienter desiderem ; apud Platonicos me interim quod sacris nostris litteris non repugnet reperturum esse confido. » (Contra Academic., III, 19.)