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TROISIÈME ENNÉADE.


car, dans le dernier cas, il ne se forme dans l’âme aucune de ces images qui sont les causes des passions. C’est ainsi que, pour se délivrer des images dont on est obsédé dans le rêve, on réveille l’âme occupée par ces images[1]. C’est en ce sens encore qu’on peut dire que les passions sont produites par les représentations des choses extérieures, en regardant ces représentations comme des passions de l’âme[2].

Mais qu’est-ce que purifier l’âme, puisqu’elle ne saurait être souillée ? Qu’est-ce que la séparer du corps ? Purifier l’âme, c’est l’isoler, ne pas lui permettre de s’attacher aux autres choses, ni de les regarder, ni de recevoir des opinions qui lui sont étrangères, quelles que soient d’ailleurs ces opinions et ces passions, comme nous l’avons dit ; c’est, par conséquent, l’empêcher de considérer des fantômes et de produire les passions qui les accompagnent.

  1. Voy. ci-après § 6, p. 142.
  2. On retrouve toute cette théorie dans S. Augustin : « Hæc memoria quæcunque de motibus tenet, qui adversus passiones corporis acti sunt, φαντασίαι græce vocantur, nec invenio quid eas latine malim vocare ; quas pro cognitis habereatque pro perceptis opinabilis vita est, constituta in ipso erroris introitu. Sed quum sibi isti motus occursant et tanquam diversis et repugnantibus intentionis flatibus œstuant, alios ex aliis motus pariunt ; non jam eos qui tenentur ex occursionibus passionum corporis impressi de sensibus, similes tamen, tanquam imaginum imagines, quae phantasmata dici placuit. Aliter enim cogito patrem meum, quem sæpe vidi, aliter avum, quem nunquam vidi ; horum primum phantasia est, alterum phantasma ; illud in memoria invenio, hoc in motu animi, qui ex iis ortus est quos habet memoria… Sed vera etiam phantasmata habere pro cognitis summuserror est ; quanquam sit in utroque genere quod nos non absurde scire dicamus, idest sensisse nos talia, vel imaginari nos talia… Sequuntur autem nonnulli phantasmata sua tam precipites, ut nulla sit alia materies omnium falsarum opinionum, quam habere phantasias vel phantasmata pro coguitis, quae cognoscuntur per sensum. Quare his potissimum resistamus, nec eis ita mentem accomodemus, ut, dum in his est cogitatio, intelligentia ea cerni arbitremur. » (De Musica, VI, 11.)