Page:Plotin - Ennéades, t. II.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
288
QUATRIÈME ENNÉADE.


comme un miroir à recevoir toute espèce d’image[1]. La Nature dans l’univers forme avec un art admirable tous les êtres à l’image des raisons qu’elle possède : dans chacune de ses œuvres la raison [séminale] unie à la matière, étant l’image de la raison supérieure à la matière [de l’idée][2], se rattache à la Divinité [à l’Intelligence] d’après laquelle elle a été engendrée, et que l’Âme universelle a contemplée pour créer[3]. Il était donc également impossible qu’il y eût ici-bas quelque chose qui ne participât pas de la Divinité, et que celle-ci descendît ici-bas : car elle est l’Intelligence, le Soleil qui brille là-haut. Considérons-la comme le modèle de la Raison (παράδειγμα τοῦ λόγου). Au-dessous de l’Intelligence est l’Âme, qui en dépend, qui subsiste par elle et avec elle. L’Âme tient à ce Soleil [à l’Intelligence] : elle est l’intermédiaire par lequel les êtres d’ici-bas se rattachent aux êtres intelligibles, l’interprète (ἑρμηνευτιϰή)[4] des choses qui descendent du monde intelligible dans le monde sensible et des choses du monde sensible qui remontent dans le monde intelligible. En effet les choses intelligibles ne sont pas éloignées les unes des autres ; elles sont seulement distinguées par leur différence et leur constitution ; elles sont chacune en elle-même, sans aucune rela-

  1. Voy. le développement de cette comparaison ci-dessus, p. 156.
  2. Voy. t. I, p. 249, notes.
  3. Ibid., p. 191-194. Voy. encore Enn. III, liv. VIII, § 3 et 4.
  4. « Cette expression signifie que l’Âme universelle est l’image et la parole de l’Intelligence, comme l’Intelligence elle-même est l’image et la parole de l’Un : « L’Âme est la parole et l’acte de l’Intelligence, comme l’Intelligence est la parole » [le Verbe] de l’Un. » (Enn. V, liv. I, § 6.) Dans son Essai sur la Métaphysique d’Aristote (t. II, p. 441), M. Ravaisson fait remarquer à ce sujet que, selon saint Grégoire le Thaumaturge, saint Basile, saint Athanase, saint Cyrille d’Alexandrie, saint Jean Damascène, saint Augustin, etc., ces diverses qualifications ne conviennent pas moins au Saint-Esprit à l’égard du Fils qu’au Fils à l’égard du Père. Voy. Denis Petau, Dogmata theologica, t. II, p. 679, 681. Voy. encore ci-après, p. 297, note 1.