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QUATRIÈME ENNÉADE.


habitent dans le ciel, elles n’ont pas non plus recours à la parole, comme le font celles qui sont ici-bas, par suite de leurs besoins et de leurs incertitudes. Elles agissent avec ordre et conformément à la nature, sans rien prescrire, sans délibérer. Elles se connaissent les unes les autres par une simple intuition (ἐν συνέσει), comme il nous arrive ici-bas de connaître nos semblables sans qu’ils nous parlent et par la seule vertu du regard[1]. Là-haut, tout corps est pur et transparent : chacun est tout œil ; rien n’est caché ni simulé ; avant que vous ayez parlé, votre pensée est déjà connue[2]. Quant aux démons et aux êtres animés qui habitent l’air, on peut croire qu’ils se servent de la voix : car ils sont des êtres vivants (ζῶα)[3]. »

    l’esprit qu’en les voyant tracées sur le sable, ou comme la justice est autrement représentée dans la vérité immuable que dans l’âme du juste. Il en est ainsi de tous les objets de la connaissance… Toutes ces merveilles de la création sont autrement connues des anges dans le Verbe de Dieu, où elles ont leurs causes et leurs raisons éternellement subsistantes et selon lesquelles elles ont été faites, qu’elles ne peuvent être connues en elles-mêmes. Ici, connaissance obscure qui n’atteint que les ouvrages de l’art ; là, connaissance claire qui atteint l’art lui-même. » (Cité de Dieu, XI, 29 ; t. II, p. 317 de la trad. de M. Saisset.)

  1. « Il est fort possible et fort croyable que dans l’autre vie nous verrons de telle façon les corps du ciel nouveau et de la terre nouvelle que nous y découvrirons Dieu présent partout, non comme aujourd’hui, où ce qu’on peut voir de lui se voit en quelque sorte par les choses créées,… mais comme nous voyons maintenant la vie des hommes qui se présentent à nos yeux. Nous ne croyons pas qu’ils vivent, nous le voyons. » (S. Augustin, Cité de Dieu, XXII, 29 ; t. IV, p. 359 de la trad. de M. Saisset.)
  2. « Et nos pensées aussi deviendront visibles, etc. » (S. Augustin, ibid.)
  3. Ce passage est cité par Hermias dans son Commentaire sur le Phèdre (p. 94) : « Plotin, dans le premier livre des Questions sur l’âme, dit avec raison que les démons qui habitent dans les airs se servent de la voix : car le choc imprimé à l’air constitue la voix. » Voy. encore sur ce sujet M. H. Martin, Études sur le Timée, t. II, p. 144.