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LIVRE CINQUIÈME.


l’air n’était pas affecté ; c’est sans doute parce que le milieu n’a pas éprouvé de modification et que la lumière n’est pas encore venue s’unir à notre vue. Dans cette hypothèse [qui admet que l’air reçoit et transmet une affection] il est difficile d’expliquer pourquoi pendant la nuit nous voyons les astres et en général toute espèce de feu.

Si l’on suppose que l’âme reste en elle-même, mais qu’elle se serve de la lumière [émanée de l’œil], comme d’un bâton, pour atteindre l’objet visible, il faudra, en ce cas, que la perception très vive ait pour cause la résistance éprouvée par la lumière dans sa tension[1], et que la couleur sensible, en tant qu’elle est couleur, ait elle-même la propriété de réfléchir la lumière : de cette manière, le contact s’opérera par un milieu. Mais la lumière s’est auparavant approchée de l’objet sans qu’il y eût un milieu ; de cette manière, le contact opéré ensuite par un milieu produirait la connaissance par une espèce de mémoire et de raisonnement. Or il n’en est pas ainsi.

Si l’on suppose enfin que la lumière contiguë à l’objet visible soit affectée et transmette ensuite cette affection de proche en proche jusqu’à la vue, cette hypothèse est au fond la même que celle qui prétend que le milieu doit être modifié préalablement par l’objet visible, hypothèse que nous avons déjà discutée plus haut.

V. Faut-il admettre que, pour l’ouïe, l’air est d’abord mis en mouvement, puis que, ce mouvement se transmettant de proche en proche et sans altération depuis l’air qui produit le son jusqu’à l’oreille, le son arrive ainsi jusqu’au sens ? Ou bien le milieu est-il affecté ici par accident, et seulement parce qu’il est interposé, de telle sorte que, si le milieu était anéanti, une fois que le son serait produit par le choc de deux corps, nous le sentirions aussitôt ? — Il faut que l’air soit d’abord mis en mouvement, mais le milieu qui

  1. Voy. ci-dessus, p. 411, note 1.