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CONFIDENCES DE PAMS

pour retrouver Milner à Beauvais. Aussitôt affranchi de sa laisse, Pichon vient me voir. Encore prend-il la précaution de me dire qu’il est envoyé par Clemenceau. Même de loin, cette grande ombre pèse sur lui. Il veut m’entretenir de la proposition faite à notre attaché militaire à La Haye, le colonel Boucabeille, pour l’achat possible de la Volkszeitung. Clemenceau songe toujours à envoyer Marc Réville en mission. Je propose que, s’il est envoyé, on le prie de ne rien faire que d’accord avec Allizé et même de s’assurer d’abord que notre ministre ne préfère pas une autre voie. Pichon entre dans mes vues, mais naturellement, quoique Clemenceau lui ait laissé toute latitude, il attendra son retour avant de rien faire de définitif.

Pichon me raconte que Maringer s’est procuré, on ne sait comment, des documents établissant que le nonce du Pape serait d’accord avec l’Allemagne pour entreprendre en Italie avec Nitti une campagne contre Orlando et Sonnino et l’on tâcherait de faire la même campagne en France contre le ministère Clemenceau. Pichon se félicite de ce que les deux millions que Nitti, ministre du Trésor, avait demandés à la France pour une propagande franco-italienne et qui avaient été promis triomphalement par lui et par Clemenceau à la prière de Franklin-Bouillon, soient encore dans les coffres-forts du Quai d’Orsay.

Pams vient, avec une bonne grâce souriante, s’excuser de ne m’avoir pas parlé du mouvement préfectoral dont la nomination de Delanney à Tokio doit être le point de départ. « Mais, me dit-il, ce n’est pas moi qui ai préparé ce mouvement. Je ne suis qu’un exécutant des décisions prises par le président du Conseil et il a dû vous tenir au courant. — Oui, il m’a dit avant-hier qu’il comptait nommer Delanney à Tokio. Vous présenterez sans doute les décrets au conseil mardi ?