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LE CORPS TCHÈQUE EN SIBÉRIE

plus je lui répète combien j’ai trouvé cet accord fâcheux. Il s’en lave les mains et me dit que tout a été fait au ministère de la Guerre. Je ne le sais que trop. On a cédé à d’innombrables protestations de femmes de prisonniers qui venaient en délégations. Pichon m’apprend ensuite que Clemenceau voulant réorganiser à sa manière la maison de la presse et le service de propagande, mettra Klobukowski à la tête. Il songe, pour le remplacer au Havre auprès du gouvernement belge, à Saint-Aulaire ou à Defrance.


Mardi 21 mai.

Conseil des ministres.

Clemenceau me donne à lire une longue lettre qu’il vient de recevoir de lord Robert Cecil. Celui-ci, au nom de Balfour et du gouvernement anglais, propose que sans attendre la réponse américaine au sujet des Japonais, l’Angleterre et la France laissent le corps tchèque en Sibérie pour y former le noyau d’une armée alliée. Robert Cecil fait valoir que le transport en France sera très difficile, occupera beaucoup de tonnage et prendra beaucoup de temps. Ses objections sont tout à fait sérieuses et vaudraient la peine d’être examinées, chiffres en mains. Mais Clemenceau tient aux Tchèques, dont il a annoncé l’arrivée un peu partout. Il proteste : « On veut nous prendre nos Tchèques, c’est inadmissible. Du reste, consentiraient-ils à rester en Russie pour se battre contre les Russes ? » Il parle ensuite des grèves qui, dit-il, sont terminées à Paris et dans la Seine. Quant au bassin de la Loire, ce ne sera rien. Il faut surveiller Andrieux, Péricat et quelques autres. Mais, dit-il, il ne veut prendre aucune mesure de rigueur, il ne veut pas porter le premier coup. Mais si on le lui porte ?

Il ne veut ni prévoir, ni prévenir ; il se contente