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LA VICTOIRE

félicité Deschanel, Sharp et Pichon, mais il n’a rien dit à Dubost.

Défilé d’un régiment américain et d’un régiment français, au milieu d’acclamations enthousiastes.


Lundi 8 juillet.

Clemenceau, qui vient de passer deux jours aux armées, m’arrive rempli d’exaltation. Jamais, dit-il, il n’a vu tant d’entrain et tant de confiance. Il a des larmes aux yeux en me racontant que des soldats sont venus, en le saluant, lui apporter des fleurs. — « Oui, lui dis-je, j’ai remarqué que lorsque le soldat se bat bien, son moral est bon.

— Oui, vous avez raison. Autrefois, je ne comprenais pas le soldat, je le plaisantais. Maintenant, je comprends mieux tout ce qu’il signifie. Partout, j’ai trouvé le même désir d’être attaqué, la même foi dans la résistance. Jamais on n’a été plus prêt. »

Il est malheureusement certain que si Clemenceau n’a pas, comme le prétend Dubost, abdiqué toute faculté critique, son émotivité, peut-être un peu sénile, lui enlève en ce moment quelque faculté d’observation.

« Ah ! ces Anglais, me dit-il, ils m’en donnent, du fil à retordre ! Par rapport aux propositions qu’ils nous avaient faites, nous sommes arrivés au texte d’un accord inoffensif. Au fond, ce que Lloyd George désire, c’est que le comité de guerre établisse des plans pour la Palestine, c’est sa préoccupation constante ; mais il va sans dire que Foch seul préparera les plans pour le front français. Il a stipulé qu’il ne les ferait connaître à personne. Puisque nous aurons des troupes anglaises à Paris pour le 14, j’ai réfléchi — vous allez être content — qu’il faut avoir quelques Belges. Mais je ferai venir aussi des Serbes parce que, après tout,