Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/137

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se replier sur Anvers, laissant le chemin libre vers Bruxelles et rompant le contact établi entre l’armée belge et la nôtre. M. de Broqueville, interrogé à Anvers par notre ministre, a déclaré que la situation était, en effet, devenue critique. Avant-hier, entre Tirlemont et Westerlo, une armée belge, forte de cinquante mille hommes, a subi la formidable poussée de quatre corps d’armée allemands. L’état-major belge a eu l’impression très nette que ses troupes étaient menacées d’un mouvement enveloppant, tenté pour les dissocier et pour investir Anvers. Il a décidé de les retirer dans le camp retranché de cette place. Préoccupé de voir inopinément découverte la gauche des armées franco-britanniques, le colonel Aldebert a pris sur lui d’adresser au chef d’état-major général de l’armée belge une note où il signale les dangers d’une rupture de contact29. M. Klobukowski trouve un peu vive la forme de cette note. MM. Doumergue et Viviani l’ont communiquée à M. Messimy, qui en a référé au général Joffre, et tous quatre sont d’avis que l’émotion du colonel Aldebert est injustifiée. L’armée belge ne peut, disent-ils, tenir indéfiniment en rase campagne contre des forces supérieures ; il n’y a donc pas d’inconvénient à ce qu’elle se replie sur Anvers. Le général Sordet, qui opère en Belgique, n’a pas de surprise à redouter, puisqu’il n’a sous ses ordres que de la cavalerie et une brigade d’infanterie montée sur automobiles. Du point de vue militaire, il importe peu que les Allemands entrent à Bruxelles. Le retard que leur a imposé la résistance de Liége nous a permis d’achever entièrement notre concentration,