Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/146

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autres Alsaciens, fidèles à la France, l’abbé Wetterlé, député de Ribeauvillé, et M. Laugel, député de Molsbeim. L’abbé, qui est en tenue civile, est un homme de petite taille, aux yeux vifs et à la physionomie ardente. Tous trois s’accordent à penser qu’il sera bon de les consulter avant d’organiser pour l’Alsace un régime administratif destiné à être appliqué soit pendant la guerre, soit pendant les quelques années de transition qui suivront la paix. Ils ont appris qu’une commission vient d’être chargée d’examiner les questions alsaciennes et ils demandent à y être adjoints. Je suis étonné d’apprendre l’existence de cette commission, dont personne ne m’a jamais parlé. Elle a, paraît-il, commencé à fonctionner dans les locaux du Conseil d’État. Plusieurs membres de la Haute Compagnie siègent journellement en uniforme et se partagent dès maintenant des postes administratifs en Alsace. Ce serait du meilleur vaudeville, si nous ne nous trouvions dans des circonstances aussi tragiques. Personne ne sait exactement, ni par qui, ni comment, cette commission a été instituée. J’ignore si nous sommes en présence d’un phénomène de génération spontanée ou d’une création du G. Q. G.

Dans l’après-midi, le préfet du Nord téléphone aux ministères de la Guerre et de l’Intérieur que la population de Lille est très inquiète. On prévient l’Élysée. Le bruit court que les Allemands s’avancent en masse sur Mons et sur Charleroi. Une division de cavalerie marcherait vers Lille. Peut-être, me disent les deux ministres, ces renseignements sont-ils faux ou prématurés. Mais M. Messimy ajoute que Lille est maintenant ville ouverte et que le général d’Amade, qui s’y trouve,