Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/218

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

prématuré d’examiner cette question et j’obtiens qu’elle soit réservée. Mais Guesde et Sembat demandent que, si le départ a lieu, des membres du gouvernement restent, au moins, à Paris pour l’y représenter. Sur ce point également, la décision est ajournée. Les deux ministres socialistes expriment enfin le vœu qu’on arme les habitants pour la défense de la ville. Mais Millerand leur fait remarquer, et j’appuie ses observations, que l’armement de la population exposerait Paris à d’horribles représailles, puisque partout les Allemands ont pris prétexte de coups de feu attribués à des civils pour incendier les maisons de citoyens inoffensifs. Sur tout ce qui touche à la défense de Paris, le Conseil décide d’entendre demain, sous ma présidence, le Général Gallieni.

Les télégrammes que nous recevons dans la journée n’apportent aucune diversion à nos tourments. Toujours la même obscurité sur les projets de la Turquie, mais de nombreux émissaires panislamites partent de Constantinople pour l’Afrique du Nord1. Des militaires et marins allemands continuent à traverser la Bulgarie pour aller retrouver le général Liman von Sanders. Les ministres alliés à Sofia se sont vainement plaints au gouvernement bulgare de cette cynique violation de la neutralité2. L’Allemagne se livre de même à toutes sortes de manœuvres à Bucarest pour entraîner le roi Carol à une résolution extrême, contraire à l’opinion générale du pays. Notre ministre, M. Blondel, fort inquiet de cette pression, voudrait que la Russie offrît à la Roumanie