Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/271

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pour élargir le champ de l’union sacrée, un membre éminent de la droite, le comte de Mun ou M. Denys Cochin, entre dans le gouvernement. Viviani parait maintenant moins défavorable à ce geste de concorde. M. Denys Cochin vient lui-même me voir et me répète qu’il offre ses services au gouvernement. Je le remercie et lui promets de faire ce qui dépendra de moi pour qu’on les utilise.

M. Paul Deschanel, qui vient amicalement à la préfecture plusieurs fois par jour, me dit que Bordeaux, envahi par des Parisiens de tout genre, ressemble, en ce moment, à une ville de plaisir et que des ministres, que, du reste, il refuse de me nommer, y donnent eux-mêmes un lamentable exemple, en dînant avec des actrices dans des salles de restaurant. Aucun écho de ces scandales n’est venu jusqu’ici à mes oreilles. Dans ma silencieuse et austère préfecture, je n’entends rien de ce qui se passe dans la ville. Est-il vraiment possible qu’à l’heure où nous sommes, des Français puissent s’étourdir ou s’oublier ainsi ? Tout l’avenir du pays dépendra de ce qui se passe aujourd’hui sur l’Ourcq et sur la Marne. Dès ce matin, par l’étroite vallée de la Gergogne, la 6e armée a pris une vigoureuse offensive de Bouillancy vers Acy-en-Multien, de manière à tenter d’envelopper l’aile droite ennemie, pendant que Sarrail essaie de bousculer l’aile gauche. Comment penser à autre chose qu’à cette bataille lointaine, trop lointaine et trop invisible ?



1. Télégramme de M. Geoffray, n° 211, Brest.
2. Voir La gloire de Gallieni, par M. Gheusi, p. 66 et 67.

Lundi 7 septembre

L’officier de liaison, commandant Guillaume, me dit que le général Joffre est très satisfait du commencement des opérations. La bataille s’engage