Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/428

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et le maire. Une confiance plus intime s’établit entre eux et la conversation se poursuit cordialement assez tard dans la soirée.



1. Voir Dunkerque, ville héroïque, par Henri MALO, Perrin et Cie, 1918.
2. Voir Life of lord Kilchener, by sir George ARTHUR, vol. III, p. 74 et s. Macmillan and Co, London.
3. Réception du maréchal Foch à l’Académie française, séance du 5 février 1920. Librairie académique Perrin et Cie

Lundi 2 novembre

Jour des morts. Mais les morts ont maintenant tous les jours pour eux. Les Allemands continuent leur violente poussée dans la direction du Kemmel, mais ils n’avancent plus.

De grand matin, nous partons de Dunkerque, Millerand et moi, et nous prenons le chemin de la Belgique. Les routes sont encombrées de charrettes, de chariots, de chars à bancs, qui transportent des émigrants de tous âges, des meubles, des nippes, du linge, des vivres. Spectacle de désolation et de misère épouvantée. Partout aussi des soldats français, anglais et belges, les uns en formations régulières, les autres au repos dans leurs cantonnements. Nous traversons la frontière et nous arrivons à Adinkerque, où pataugent lamentablement dans la boue des centaines de militaires et de civils. Avec sa bonne grâce cou-tumière, le roi Albert est venu jusqu’ici pour nous recevoir sur le territoire belge. Il porte la tenue de campagne et sur son dolman noir est épinglée, sans aucune autre décoration, la médaille militaire française. D’un ton bienveillant, discret, presque timide, il me remercie de ma visite et me fait un grand éloge de notre armée, notamment de la 42e division, qui a épaulé les Belges sur leur gauche et des fusiliers marins, qui les ont soutenus sur leur droite. Il ne se dissimule pas, me dit-il modestement, que ce sont eux qui lui ont permis de défendre contre l’invasion un petit réduit de territoire belge. Je lui réponds que c’est la Belgique