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Mardi 17 novembre

Viviani arrive au Conseil tout rasséréné. Il a, de nouveau, téléphoné à Briand qui, non seulement lui a encore donné l’assurance qu’il était tout à fait étranger à la publication de l’entrefilet, mais qui lui a promis de faire passer une note rectificative. Tout est bien qui finit bien. Mais, avec la vie que nous menons, il est trop naturel que certains des ministres aient les nerfs à fleur de peau. Ceux de Viviani sont parmi les plus vibrants.

Beaucoup de journaux de Paris ont, malgré la censure, commenté en termes désagréables pour le gouvernement la mission de M. Caillaux au Brésil. Une grande part de ces critiques m’est, bien entendu, réservée… Je suis responsable de tout ce qui se passe et plus particulièrement de tout se ce qui passe malgré moi. Comme j’en prendrais joyeusement mon parti, si, après cela, la France était sauvée !

Mais nous sommes encore loin de la victoire finale. Si l’accalmie continue dans les Flandres, la bataille redouble dans l’Est. Devant Saint-Mihiel, nous avons essayé de rejeter les Allemands sur la rive droite de la Meuse. Nos troupes les ont attaqués dans Chauvoncourt et ont pris pied dans nos grandes casernes, où ils étaient installés. De furieux combats sont engagés dans tous les environs de Sampigny, dans la forêt d’Apremont, autour de Marbotte et de Mécrin, et surtout dans ce paisible bois d’Ailly qui, devant mes fenêtres du Clos, couronne si gracieusement les collines de la rive droite.