Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/462

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de l’ennemi, mais encore, en menaçant la droite des Allemands, déterminé leur retraite. Notre seconde réplique est aujourd’hui acquise. C’est la bataille des Flandres. De nouveau, l’état-major allemand a tenté, avec obstination, d’envelopper les armées alliées. De nouveau, cette tentative a échoué. Loin de gagner du terrain, les Allemands en ont perdu et ils ont, dans ce vain effort, sacrifié de gros effectifs. Cette seconde série de nos succès s’est déroulée du début d’octobre au milieu de novembre. Pour atteindre son but et déborder notre gauche, l’état-major allemand a entassé dans la région du Nord, entre la Lys et la côte, près de douze corps d’armée. Ils ont encore été renforcés au commencement de novembre par une division de fusiliers marins et par une division du Ve corps de réserve. C’est dans la région d’Ypres que nous avons eu à subir le choc le plus violent. Dès les premiers jours d’octobre, le kronprinz de Bavière avait, dans une proclamation, exhorté les troupes à « faire contre l’aile gauche française l’effort décisif » et à « trancher ainsi le sort de la grande bataille entamée depuis des semaines ». L’empereur en personne s’était porté à Thielt et à Courtrai pour encourager par sa présence l’ardeur de ses troupes. La presse allemande, confondant ses espérances avec la réalité, avait elle-même donné à cette bataille le nom de Calais. Enlever Ypres, c’était couper notre gauche en deux ; atteindre Calais, c’était achever de la briser ; c’était, en outre, toucher à la mer, menacer la Grande-Bretagne dans le ravitaillement de son corps expéditionnaire, peut-être même dans sa tranquillité insulaire. Voilà le plan que l’Allemagne avait conçu, préparé, proclamé. Il vient d’échouer.